Pourquoi j'ai quitté mon emploi de rêve chez Ubisoft

par | 31 Jan 2016

Voici un résumé du récit de Maxime Beaudoin sur son blog. Non, perso, je n’ai jamais bossé pour Ubisoft, et cela m’étonnerait qu’un jour cela arrive (sauf comme externe)- un peu pour les mêmes raisons d’ailleurs.

Maxime: « 2005, mon patron me demande où je me vois dans 10 ans. Je lui réponds sans hésiter: Je veux être architecte logiciel sur un projet AAA! Ceci devient réalité chez Ubisoft, puis je quitte brusquement la société et je lance une petite entreprise de jeux indie avec ma petite amie. Certains de mes amis et la famille ont trouvé ce mouvement … disons simplement … étrange. Ils se demandent pourquoi je suis parti, un emploi bien rémunéré avec la sécurité, des tonnes d’avantages, y compris la renommée de travailler sur le prochain gros jeu dont tout le monde va parler. »

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Au revoir, au revoir… président !

En 2005, Ubisoft annonce qu’ils ouvrirent un nouveau studio à Québec. Je suis recruté avec environ 30 autres employés pour son ouverture, je suis émerveillé. Au cours de mes premières semaines chez Ubisoft, je ne pouvais pas croire que je suis effectivement payé pour jouer et créer des jeux! C’est mieux que des vacances.

Les deux premières années, je travaille sur des petits titres PSP. J’ai eu beaucoup de plaisir à y travailler, j’ai beaucoup appris, et me suis fait de très bons amis, grâce à de petites équipes d’environ 25 personnes, faisant que tout le monde se connaissait. Nous espérions passer sur des projets AAA car ce n’était pas très Glop de parler de petits projets à ses amis.

Puis, nous avons participé à un jeu plus grand sur Wii, un projet de 3 ans, mon travail a pu avoir un impact majeur sur celui-ci. L’équipe est de 75 personnes, un peu grande mais permettant de participer à toutes les étapes et de connaître l’ensemble des personnes.

J’ai ensuite été mis sur un petit projet de portage de jeu avec une équipe qui passe de 2 à 15 personnes, l’ambiance est super, le défi génial et réussir est très motivant et enthousiasmant. Mais la deuxième partie du projet fut de corriger les bugs et de faire des optimisations, que des répétitions en somme.

Je suis ensuite passé sur de plus petits projets où nous étions peu et donnions notre avis sur toutes les parties. C’est ma meilleure expérience au sein du studio!

Ensuite, je passe sur un jeu AAA, le Graal pour moi…. au début! Le travail est effectué en collaboration avec 10 studios à travers le monde, le travail est effectué 24h/24, quand un studio va se coucher, un autre commence sa journée! Le problème de la participation à ce genre de jeu est la spécialisation: comme une ligne d’assemblage dans une usine automobile. Il est impossible de communiquer avec tout le monde et même en temps que responsable (mais responsable de quoi au fait?), vous n’avez pas forcément votre mot à dire, et en plus, vous n’êtes plus réellement sur le jeu mais devant votre messagerie . Il y a des couches et des couches de gestionnaires, chefs de projet, producteur associé,  producteurs, coordonnateurs, directeurs de production, etc. Il y a aussi les gestionnaires pour gérer les gestionnaires….. »

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Voilà les principales raisons pour lesquelles Mathieu a quitté Ubisoft et les jeux AAA pour aller travailler avec ses propres équipes et travailler sur des jeux indies à 5-6 personnes. Mais bien sur, peut-être faut-il le vivre pour vraiment le comprendre? J’ai d’autres potes qui ont la même expérience et font le même constat – quand on aime créer des jeux, on ne peut pas rester sous les rouleaux compresseurs que sont les gros studios. C’est probablement bien d’y passer quelques années pour se faire une idée du métier et des contacts… mais ce n’est pas certain.

En même temps, devoir travailler sur des petits jeux casuals de merde chez un indie, produire 1 titre tous les 2 mois en reproduisant un gameplay déjà connu… et insérer 2 ou 3 pubs au passage… plutôt récurer les chiottes d’une grande surface. On dit qu’il n’y a pas de sot métier… si dans le jeu vidéo, il y en a. En même temps, je ne dis pas que tous les jeux de de type sont pourris… non, tout jeu qui trouve son public, ou dans lequel le ou les auteurs se sont investis, mérite le respect. En fait, ce que je n’aime pas, c’est quand les gens font un travail de merde en sachant que c’est un travail de merde… juste parce qu’ils sont payés pour le faire ou par ce que ça se vend. Dès qu’ils y mettent un peu de passion… c’est transfiguré.

 

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4 Commentaires

  1. Franck

    J’ai envie de dire qu’il n’y a pas que dans le jeu vidéo où l’effet « grosse structure » détruit la créativité par la rationalisation à outrance…
    Des sots métiers, on en rencontre aussi dans l’industrie…
    Mais ça me rend triste que le choix devienne souvent entre la sécurité ennuyeuse, ou la précarité fun…

    Réponse
    • greg

      la sécurité ennuyeuse ou la précarité fun… oui, c’est exactement ça, mais dans un premier temps seulement. Si on veut vivre sa passion, et qu’on s’accroche sans concession, ça peut prendre du temps, mais je crois qu’à l’arrivée, ça finit toujours par payer. Et puis au pire, même si pendant ce temps on gagne peu, on aura pas bossé pour rien 😉

      Réponse
  2. Ceciest Lemien

    La passion dans les JV ?
    Au 21ème siècle ?
    Arrêtez de rêver les gars, c’est un métier qui doit rapporter comme tous les métiers, pas un gang de poteaux qui font ça en dilettantes et juste pour le kif.
    Et Ubi sont les pires, en capacités, en professionnalisme, en respect du client, mais c’est sûr que niveau commercial ils n’ont de leçon à recevoir de personne.
    Plus qu’à attendre que ce genre de cadors ouvertement méprisants se cassent la gueule une bonne fois, ça assainira le paysage et permettra peut-être de repartir sur des bases plus saines et surtout moralement plus défendables.

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    • greg

      Disons que cela dépend de la taille du projet. J’ai bossé pour ma part sur des projets avec moins de 20 personnes, et on arrive encore à trouver sa place. De toutes façons, on reste spécialisé. Mais comme dev, j’ai pu faire du dev outil, du gameplay, etc. On est plus impliqué et on peut influencer le reste de l’équipe sur certains choix, même coté scénario.
      Mais dans des projets où il y a plus de 100 personnes, c’est forcément de l’industriel – peu sont ceux à avoir un aperçu complet du projet. UBI est le plus gros à ma connaissance, donc il n’échappe pas à cette règle.
      Non, je crois que la passion existe toujours, mais faut pas aller la chercher sur des gros projets.

      Réponse

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